
Cheikh Sidi
Bémol : « Gourbi Rock »
CSB
Productions /Undergroone 2007.
Le dernier
album de Cheikh Sidi Bémol est un véritable manifeste du Gourbi-Rock, appellation inventée par le journaliste algérien Aziz
Smati pour définir la musique de cet artiste inclassable : des textes (co-signés
par Sid Ahmed Sémiane) sans tabous ni concessions, des mélodies limpides
appuyées par des riffs tranchants, une orchestration sobre et efficace, guitares,
basse et batterie.
Le premier
titre, Rxis (salopard), étonnante fusion entre le bédoui et les Stones, démarre sur les chapeaux de roues pour
dénoncer tous les faux culs, vrais escrocs, qui se camouflent derrière la
politique, la religion ou l’uniforme.
Saâdiya, sur une rythmique guellal, raconte
l’histoire d’une jeune fille, belle et naïve, abusée par des idiots sans
scrupules, qui se venge en faisant fortune dans la prostitution.
Suit une
belle ballade, Ma Tloumniche (ne m’en veux pas), qui raconte la
douleur et le désarroi des parents de disparus, leur lutte courageuse pour
la vérité, la justice.
Gouli (dis-moi)
est un chant gnawi mitonné de blues, qui enchaîne les questions sur la
conscience, la peur et les regrets.
Wachen Hada (qu’est-ce
qui se passe ?), dans un groove très original saccadé par un riff à la
Police, évoque le calvaire des Palestiniens et l’impuissance des Nations.
Wah’dek (seul),
ténébreux rock oriental qui se rie de la mort, finit en paraphrasant
Brassens : « je quitte la vie
sans rancune, j’aurai plus jamais mal aux dents ».
Bab El Mina (la
porte du port) est ciselé sur une énergique tournerie qarqabou pour
illustrer ces vagues pleines de rêves qui
déferlant sur le port et fauchant leur moisson de clandestins.
Walou (rien),
très beau blues avec un superbe solo de banjo chaâbi, raconte l’histoire d’un
clodo, surnommé « Rien ».
Yaxxi Hala (quelle
affaire !), ritournelle obsédante façon chant traditionnel, est un virulent
réquisitoire contre la politique américaine depuis les attentats de 2001.
Lalla Garmiya (Madame
Garmiya) est un étrange mélange de guitares et de boucles de violons mettant en scène un ivrogne qui rêve de
reconquérir sa bien aimée.
Ces dix
chansons démontrent, encore une fois, la singularité de Cheikh Sidi Bémol qui,
sans cesse, explore de nouvelles pistes pour la chanson algérienne.
Nadir B.